Gilles Goujon*** (Fontjoncouse)
Il faut y arriver chez Gilles Goujon, à Fontjoncouse car la route est sinueuse…et étroite !
C’est à 30 km de Narbonne, dans un petit village des Corbières que Gilles Goujon a racheté en 1992 l’Auberge du vieux puits qui avait connu trois faillites successives. Malgré les commentaires qui disaient qu’il était tombé sur la tête, Gilles Goujon a relevé le pari de décrocher près de 20 ans plus tard sa 3ème étoile au même endroit !
Mais attention, ici, on est loin des restaurants étoilés guindés et sans chaleur. La générosité et la gentillesse du chef transpirent partout, de l’assiette, au chariot géant de fromages, en passant par le service, réellement souriant et sympa.
Après avoir choisi le menu dégustation « Quelques pas dans la Garrigue » (135 euros), trois sortes de beurre nous sont apportées : fleur de sel, jus de betterave et algues. Les goûts sont certes originaux mais la présentation est franchement rigolote car on dirait des petits chocolats !
Le pain proposé n’est pas maison mais est délicieux et pour cause, il est réalisé par un meunier de la région qui fait également son blé et sa farine. Il va falloir se calmer sur le pain là ! Sinon, on ne va plus rien manger...!
Avant l’arrivée des amuse-bouches, le Chef salue ses visiteurs en salle, accueil très chaleureux, un peu rustique, j’aime ça.
Viennent alors les mises en appétit dont les noms évocateurs ne laissent rien deviner de ce que l’on va découvrir dans l’assiette : salade niçoise (regardez-la, il faut le faire !), pieds de porc sauce gribiche, et boule de pain garnie au foie gras notamment.
Moi qui ne suis pas fan des pieds de porc, je racle le fond de ma verrine pour ne pas laisser une miette de ce mélange parfumé et coupé si fin qu’on en oublie le pied de cochon !
Dans ce menu, c’est un peu le Chef qui décide ce qu’il vous sert donc malgré la carte, c’est la surprise sur ce que vous mangerez ou pas !
Monsieur a droit à « L'huître Tarbouriech juste pochée sur une crème iodée et un tartare d’huître ». Le plat est très joli grâce notamment à une sphère de sucre représentant une perle géante qu’il faut briser avec un petit marteau pour faire s’évaporer une vapeur de bois de hêtre fumé.
Quant à moi, le chef m’a concocté un « Gnocchi au cœur coulant d’herbes fraiches, espuma de girolles ».
Vient ensuite THE PLAT, une tuerie intersidérale : « L’œuf poule Carrus ‘pourri’ de truffes melanosporum sur une mousseline de champignons et truffe d’été, briochine tiède et capuccino à boire », le tout arrosé de copeaux de truffes râpés par la serveuse.
Clin d’œil au plat de présentation (une assiette surmontée transparente, garnie de paille) qui est bien choisi. Mais surtout, quel délice, quelle douceur, quel parfum pour ce plat ! Un des meilleurs plats que j’ai jamais mangé je pense. Dans mon top 5 en tout cas !
Une deuxième entrée nous est proposée : « Fraîcheur de fleur de courgette en carpaccio à l’huile d’olive de Bize, Fontjoncousoise acidulée au basilic ». Simple mais très fin et frais grâce au sorbet à la tomate.
Après les entrées, le poisson : « Filet de rouget barbet, pomme bonne bouche fourrée d’une brandade à la cébette en bullinada, écume de rouille au safran ». Après le rituel de l’huître, voici celui du rouget car le bouillon est servi brûlant dans l’assiette, au-dessus de l’écume de rouille qui fond complètement. Des senteurs fortes d’anis, de poivrons, d’herbes aromatiques se dégagent de ce jus.
Le goût est assez fort pour moi, je ne sais pas si c’est la rouille, l’anis ou un peu de trop de sel, mais j’ai un peu de mal à terminer le bouillon de cette bouillabaisse revisitée.
Pendant que nous dégustons nos plats, la femme de Gilles Goujon fait le tour des tables pour s’assurer que tout va bien et discutent en souriant avec les clients. Très conviviale cette ambiance, car on sent qu’elle prend du plaisir à échanger avec les gens.
Côté viande, ce sera du Canard : « Aiguillette de canard de Challans aux cerises et navets glacés, nougatine à la pistache ».
La cuisson du canard est parfaite, les navets fondants et les cerises, non pas garnies d’un noyau mais de pistaches torréfiées, bref, un plat fin et équilibré pour ceux qui aiment le sucré-salé.
Après le chariot de fromages géant, nous avons droit à une assiette de pré-desserts à base de chocolat et de framboise.
Pour terminer, je choisis le dessert qui me semble le plus original, à base de mousse de carotte et carotte confite. Les petits pois n’étant jamais très loin quand on parle de carotte, des petits pois juste blanchis ont été ajoutés dans cette recette atypique. Une verrine de sorbet à la menthe vient apporter de la fraîcheur à ce dessert très doux et très fin.
C’est après le dessert que Gilles Goujon s’arrête à notre table pour prendre la température de nos impressions et échanger longuement (bien 10 minutes tout de même !) sur sa passion.
Un chef adorable, qui sait où il va (et qui doit mener sa brigade d’une main ferme et décidée), débordé mais qui prend le temps d’ouvrir une école de cuisine.
Un moment de gastronomie intense en goûts et saveurs mettant en valeur la cuisine traditionnelle, des produits locaux et de saison, le tout dans une ambiance conviviale.
On y retourne ??!!
NB : Pour ceux qui, après avoir avalé quelques verres de vin, craindraient la route sinueuse du retour, l’Auberge propose des chambres entre 145 et 290 €.
[note color="#A09FBF"]Mentions spéciales : -L’œuf "pourri" à la truffe -Les rituels des plats -Le service professionnel et agréable -La gentillesse et l’écoute des Goujon
Bémol : -Les mignardises, un peu trop classiques[/note]
Marie-Christine et Gilles Goujon Auberge du vieux puits 5 av Saint Victor - 11 360 Fontjoncouse 04 68 44 07 37